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PETITS ÉDITORIAUX SUR LES SIGNES DES TEMPS
CENSURE IMAGIÈRE, TERRORISME, PANIQUE ET PICTORICIDE
28 mars 2012. — Je ne possède pas d’exemplaire de l’édition du Chicago Tribune du 3 novembre 1948, titrant sur la plus énorme bourde de l’histoire de la presse (« Dewey Defeats Truman »), mais je détiens depuis mercredi 21 mars ce qui doit constituer un second best, la une de Charlie Hebdo sur les frappes terroristes de Toulouse et de Montauban.
« Tuerie antisémite de Toulouse ; c’est un point de détail de la campagne. » C’est monsieur Le Pen qui était ainsi mis en cause. En effet, pour les médias français, il allait de soi que le tueur de Toulouse était nazi, et c’était donc la rhétorique nauséabonde de l’extrême droite qui avait guidé son bras. Malheureusement pour Charlie, le tueur de militaires français et d’enfants juifs se révéla être un musulman, vétéran d’Afghanistan (« Tu tues mes frères, je te tue » déclara-t-il en exécutant un militaire français), et qui assassinait les enfants juifs parce qu’il s’identifiait à la résistance palestinienne et que la résistance palestinienne est, n’en déplaise à M. Stéphane Hessel et à tous les indignés, une entreprise terroriste qui vise à tuer les civils israéliens, à commencer par les femmes et les petits enfants.
Deuxième acte. Quand on lui fit remarquer sur Paris Première, le 23 mars 2012, que Charlie Hebdo était, avec sa fausse accusation contre l’extrême droite, « du côté du manche », Charb, rédacteur en chef de l'hebdomadaire, répondit sans aucune gêne que lorsqu’il était question d’antiracisme, il était en effet « du côté du manche ». Or qu’est-ce qu’un journal satirique qui est « du côté du manche », qui se range au côté du pouvoir et de l’idéologie ? On tient, je crois, un assez bel exemple d’un tel journal avec le Stürmer de Julius Streicher, rempli de désopilantes caricatures antisémites, anti-chrétiennes (les Églises chrétiennes étaient considérées par les nazis comme judaïsées) et anti-« réaction » (c’est-à-dire dirigées contre la droite allemande non-nazie). On peut être un journal satirique et se placer « du côté du manche ». On édite alors le Stürmer.
Troisième acte. Charlie Hebdo parait le plus normalement du monde le mercredi 28 mars, sous une amusante couverture montrant sa tête de turc, Sarkozy, instrumentalisant la mort du terroriste Merah à des fins électorales, et les chroniqueurs de Charlie consacrent une grande partie du numéro à fustiger ceux qui font une récupération politique des meurtres de Toulouse et de Montauban. Parce que la caricature de Charlie attribuant aux amis de Le Pen la « tuerie antisémite de Toulouse », ce n’était pas une récupération politique, peut-être ? Récupération pour récupération, la différence entre Charlie Hebdo et M. Sarkozy, dans l'espèce, c’est que Charlie ment et accuse l’extrême droite quand les coupables sont les islamistes.