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THÉÂTRE
Le Bottin


Le nouveau spectacle de Nina Nithé à la Soufflerie nous propose un des plus grands textes contemporains de théâtre. Dans un décor minimaliste, le lent défilé, d’Aaagaoui à Zyzzeck, est riche de sens et de significations. L’actrice, qui joue dos au public, décuple le pouvoir des noms. La manière qu’elle a d’en accentuer certains, de glisser sur d’autres, comme si elle les effleurait à peine, les affects qu’elle introduit — l’humour, le sarcasme, la souffrance, l’espérance, la folie —, la sûreté éblouissante du jeu, la voix merveilleusement placée, l’énergie de tout l’être, déclenchent chez le spectateur toute la gamme des émotions. La lente marche des patronymes est évocatrice de toutes les conscriptions, et donc de tous les enfers de tous les Verdun, de toutes les déportations vers tous les Auschwitz, de toutes les listes terribles de travailleurs informels exclus de la protection sociale, d’expulsés de leurs logements après la trève hivernale, de reconduits à la frontière sans argent ni espoir, de sans-papiers, de sans-logis, de sans-travail, de sans-espoir.
Le spectateur sort de ces quatre heures trente de spectacle (qui passent comme un soupir) en état de sidération. On comprend ce que devaient ressentir les privilégiés qui entendirent la conférence d’Antonin Artaud, en 1947, au théâtre du Vieux-Colombier. Le Bottin est un spectacle inoubliable, atroce, douloureux et par moments sublime.
Le Bottin, spectacle de Nina Nithé, au théâtre de la Soufflerie, jusqu’au 1er avril.

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