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MISCELLANÉES STRIPOLOGIQUES

L'Art du scan malpropre
Fantomiald et Dark Shadows
Par Harry Morgan

En cet été 2013, Disney Hachette Presse a publié deux Mickey Parade Géant, sans doute pour que les petits enfants de France aient de quoi lire dans le TGV à l'aller et au retour quand ils se rendent chez leur parent numéro 2. J'ai eu le plaisir de relire, dans le tome intitulé Fantomiald le justicier masqué (Mickey Parade Géant Hors Série Collector, 2e trimestre 2013), le premier épisode de Fantomiald, dessiné par Giovan Battista Carpi sur scénario de Guido Martina, d'après une idée d'Elisa Penna, rédactrice en chef de Topolino, parution française originale dans Donald le justicier, Mickey Parade, Le Journal de Mickey n° 1166 bis, 2e trimestre 1974. Mais ce fut au grand péril de mes yeux, car ce qu'on lit aujourd'hui dans la presse Disney, ce sont des scans malpropres, le trait noir ayant trop peu de définition, ce qui donne sur les lignes droites (par exemple les contours de case) des irrégularités et des torsades tout à fait caractéristiques. Un tel laisser-aller est d'autant plus inexplicable que la polémique anti-bande dessinée a toujours beaucoup insisté sur le danger pour les fragiles yeux des petits enfants d'images mal imprimées et trop petites. De fait, le Mickey Parade des années 1960 et 1970 était fort mal imprimé, et pauvrement (comme dans beaucoup de bandes dessinées populaires, une double page sur deux seulement était en couleur). Cependant la célèbre version française de I Classici Di Walt Disney ne donnait pas au lecteur l'impression qu'il avait un besoin urgent de lunettes.

Il est instructif de noter que les histoires modernes de Donald et de Mickey sont dessinées avec un épais trait de contour, mieux adapté au scan déplorable. On peut, au surplus, faire l'hypothèse qu'en cette époque où le centre de l'iconosphère est l'écran, une image pixellisée ne gêne absolument pas le lecteur.

Pour republier une bande dessinée, il faut d'abord la restaurer (à partir des planches originales, d'épreuves ou, dans le pire des cas, d'une version imprimée). C'est un travail très technique, très consommateur en temps, qui est accompli normalement par des sortes de bénédictins vivant au calme dans quelque campagne retirée. Certaines tentatives, émanant d'équipes peu ou mal formées, désarment la critique. Il en va ainsi d'une réédition intégrale, publiée chez Hermes Press entre 2010 et 2012, de Dark Shadows, le comic book de Gold Key, paru de 1968 jusqu'à 1976, à une époque où le célèbre soap opera gothique de Dan Curtis n'était plus diffusé à la télévision (il a été diffusé de 1966 à 1971). Les restaurateurs sont partis d'un scan des comics originaux, ont reversé par dessus l'espèce de vomi bariolé ainsi obtenu des couleurs imitant les couleurs originales, mais qui sont beaucoup trop brillantes et saturées, d'autant qu'elles sont imprimées sur un papier couché qui renvoie la lumière comme un miroir, et ont retouché au petit bonheur un trait noir qu'on ne voyait plus. Si le résultat évoque parfois une hypothétique collaboration entre Roy Lichtenstein et Andy Warhol, le résultat est — littéralement — illisible. J'avoue ne savoir que penser des fans qui ont posté en ligne leur appréciation de cette édition, parfaite à leurs yeux. N'ont-ils jamais vu un comic book des années 1970 (à la vérité, cela n'a rien d'impossible) et sont-ils trompés par l'habillage de la collection, cinq volumes de deux cent pages en couleur, avec jaquette, ne pouvant à leurs yeux contenir qu'une version parfaite ?