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CHRONIQUES DE MES COLLINES

2009-2011

par Henri Morgan

Nous avons pendant un peu plus de deux ans, entre 2009 et 2011, tenu une chronique dans une revue culturelle de l'Est de la France, sous le titre Chronique de mes collines. Nous nous étions vieilli un peu pour l'occasion, et avions francisé notre nom en Henri Morgan. Comme nous parlions des choses dont nous parlons habituellement, nous intégrons ici ces chroniques. Leur seul défaut est que, Henri Morgan étant beaucoup moins au fait des littératures dessinées que son quasi homonyme Harry Morgan, il devenait, lorsqu'il parlait de bandes dessinées (c'est-à-dire une fois sur trois à peu près), un peu plus gâteux qu'au naturel.

Harry Morgan

CHRONIQUES DE MES COLLINES

Thierry Groensteen, La Bande dessinée, son histoire et ses maîtres, Skira/Flammarion

Henri Morgan vit retiré à la campagne, et se consacre à l’étude et à la méditation.

Je suis descendu de mes collines. J’ai même pris le TGV, pour aller visiter, à Angoulême, le musée de la bande dessinée, qui a rouvert cet été dans des locaux neufs, en bord de Charente, dans d’anciens chais. Ce musée est une chose admirable. C’est un compromis entre un musée et un cabinet des estampes, puisque les planches des grands dessinateurs sont exposées, mais qu’elles sont exposées de telle sorte qu’on puisse les étudier, comme on examine un dessin ou une gravure, qu’on puisse les lire, enfin, puisque tout cela se lit, que c’est du récit en images.
J’ai ramené le catalogue, ou plutôt les deux catalogues, car il existe un immense catalogue, magnifiquement illustré, qui pèse deux kilos et demi, et qui fait le point sur l’histoire de la bande dessinée franco-belge, sur l’histoire de la bande dessinée américaine, et sur l’esthétique de la bande dessinée, et un catalogue plus modeste, mais encore très joli, qui reproduit les plus belles planches du gros catalogue.
C’est Thierry Groensteen, qui fut autrefois directeur de ce musée de la bande dessinée, alors abrité dans le bâtiment « Castro », de l’autre côté de la Charente, qui a rédigé les textes. Comme il est très difficile de traiter d’une littérature entière, fût-elle dessinée, car on risque de transformer son texte en une interminable liste de noms et de dates, une chronologie des œuvres marquantes court au bas des pages, ce qui permet de donner dans le texte lui-même des indications claires, synthétiques et de tracer une véritable histoire du médium, d’où se dégagent les grandes évolutions, non seulement de l’histoire des éditeurs et des supports, mais aussi des contenus, et, finalement du statut même de la bande desinée.
Les reproductions de planches originales, dans les deux catalogues, sont un véritable tour de force technique. Il semble qu’on emporte avec soi le musée. Elles sont étonnantes d’ailleurs, ces planches, qu’on les voie sur les cimaises ou sur les pages des catalogues. La planche originale, c’est à la fois le manuscrit d’auteur et la page imprimée, et cela représente encore toutes les étapes entre l’un et l’autre. Du manuscrit, on retrouve d’abord la nature d’archive, le jaunissement du papier, ensuite les traces de la conception, le crayon mal gommé, et pour finir les ratures, les repentirs, les zones effacés à la gouache blanche, les emplâtres collés. De la production technique, on garde les indications du chargé de fabrication et de l’imprimeur, griffonnées au crayon. Mais, encore une fois, la chose saillante, la chose unique, c’est que tout cela n’est conçu qu’en fonction de la production finale, que la planche originale ne diffère en rien de la planche imprimée, car le dessinateur l’a conçue avec à l’esprit le « rendu » de l’impression, alors qu’un dessin d’artiste, ou même une gravure, reproduits dans un livre, ne donnent jamais qu’une vague idée de ce qu’est l’original.

Thierry Groensteen, La Bande dessinée, son histoire et ses maîtres, Skira/Flammarion, 2009, 49 €
Thierry Groensteen, Le Petit Catalogue du musée de la bande dessinée, Skira/Flammarion, 2009, 18 €.