IL Y A CINQUANTE ANS PARAISSAIT SEDUCTION OF THE INNOCENT
En marge des Principes des littératures dessinées
La tentation apologétique
le docteur Wertham et ses défenseurs modernes
Par Harry
Morgan
Le Dr Wertham, un psychiatre allemand installé aux Etats-Unis en 1922, mena à partir de 1948 une croisade contre les comic books, qu'il rendait responsables de la délinquance juvénile, croisade dont le point culminant fut la publication en 1954 de son livre Seduction of the Innocent (Rinehart, 1954). Wertham y reprend les arguments de la guerre séculaire contre la lecture et les mêle à l'argumentaire sociologique de l'école de Francfort : les comic books sont une école du crime et de la perversion ; ils sont des propagateurs de l'analphabétisme ; ils sont usinés à la chaîne par des individus louches. Wertham déclencha une panique sociale aux Etats-Unis et la campagne anti-comics eut des réverbérations à travers le monde.
La littérature savante contemporaine s'est focalisée sur l'utilisation par Wertham de sa position de psychiatre, en laissant entendre qu'il tenait un double discours destiné respectivement à ses pairs et au grand public. L'observation renferme une part de vérité. Cependant, elle conduit trop souvent à décrire de façon euphémistique ce qui est essentiellement une entreprise de propagande.
Dans son excellente histoire du Comics Code, Nyberg (Amy Kiste Nyberg, Seal of Approval: The History of the Comics Code, University Press of Mississippi, 1998) soutient que la méthodologie scientifique de Wertham n'est pas absurde si l'on admet, à côté d'études reposant sur des statistiques, la possibilité en sciences sociales des études dites qualitatives. Mais, études qualitatives ou pas, la démonstration de la nocivité des comics tient en une pétition de principe. Le docteur Wertham, qui travaillait avec des délinquants juvéniles, leur demandait s'ils lisaient des comics. Comme ils répondaient par l'affirmative, Wertham en concluait que les comics étaient responsables de la délinquance juvénile. (Il est vrai qu'il soutenait par ailleurs que les comics étaient plus dangereux pour les enfants sages que pour les petits criminels !)
Nyberg explique, en réponse aux critiques ultérieures de spécialistes de sciences sociales, que le modèle théorique de Wertham est relativement sophistiqué, et qu'il ne succombe jamais à des tentations aussi naïves et inélégantes que la démonstration d'un lien causal direct entre la lecture des comics et la délinquance. Mais c'est précisément ce que fait Wertham à longueur de pages (« Up to the beginning of the comic book era there were hardly any serious crimes such as murder by children under twelve » (Seduction of the Innocent, op. cit., p. 155). La question de savoir si Wertham dispose par ailleurs d'un modèle valable aux yeux d'un spécialiste des sciences humaines est par conséquent tout à fait secondaire.
En second lieu, Nyberg note que Wertham n'était pas le monomane qu'on a parfois décrit dans le fandom, mais avait des intentions plus larges que la seule dénonciation des comics, car il faisait sienne l'analyse des médias de l'école de Francfort (il connaissait personnellement Adorno). S'il a choisi de s'en prendre aux comics, c'est parce qu'il ne se faisait pas d'illusion sur la possibilité d'ébranler des secteurs comme le cinéma, la radio ou la télévision. A vrai dire, cette découverte n'en est pas une, puisque tout lecteur de Wertham a pu constater qu'il consacre un chapitre de Seduction of the Innocent à la télévision. De plus, l'observation de Nyberg sur le choix de son adversaire par Wertham est plutôt incriminante pour le docteur, qui apparaît comme un adversaire peu chevaleresque, voire comme un « bully ».
Enfin, les vues progressistes de Wertham paraissent quelque peu douteuses : par exemple, dans son témoignage devant la Commission Hendrickson, Wertham relève le racisme d'une histoire des EC Comics (The Whipping, Shock SuspenStories n° 14, 1954), en comptant le nombre de fois qu'est employé le mot « spick », un terme insultant désignant les Portoricains. Mais l'histoire en question est en réalité une vigoureuse fable antiraciste à la façon des EC Comics, où l'on voit un petit blanc tuer sa propre fille à coups de fouet, avec l'aide de ses amis du Ku Klux Klan, en croyant débarrasser le quartier du nouveau voisin portoricain. Si Wertham avait réellement eu à cur l'intégration des gens de couleur qu'il soignait à la Lafargue Clinic de Harlem, il aurait défendu les EC Comics pour leur courageuse et continuelle dénonciation du racisme. Traiter les auteurs d'une fable antiraciste de racistes, en commençant sa déclaration par l'affirmation qu'à côté d'eux Hitler était un amateur, révèle chez Wertham non seulement un mépris complet de la vérité et un recours systématique à la manipulation, mais aussi une haine pathologique des comics et de ceux qui les créaient.
La sincérité de Wertham quand il dénonce la misogynie des comics est également sujette à caution, la polémique qu'il entretient ayant de forts relents misogynes. Les partisans des comics sont souvent des femmes, telles le Dr. Jean A. Thompson, du Bureau of Child Guidance, dépendant du Board of Education, pour la ville de New York, la pédopsychiatre Lauretta Bender du Bellevue Hospital de New York, le psychologues Sidonie Gruenberg, directrice de la Child Study Association of America, et Josette Frank, conseillère en matière de livres pour la jeunesse auprès du même organisme. Parce qu'elles examinaient, en plein accord avec leurs universités, le contenu des comics dans le cadre de conseils d'experts internes constitués par les éditeurs, Wertham les dénonça, ainsi qu'un de leurs collègues masculins, le professeur Harvey Zorbaugh de l'université de New York, comme des défenseurs appointés des comics. (Seduction of the Innocent, op. cit., p. 223.) Ce passage de l'ouvrage de Wertham constitue un bon exemple des procédés argumentatifs pour le moins douteux du psychiatre. Pour commencer, Wertham déforme gravement les faits en laissant entendre que ses collègues sont vénales et défendent les comics moyennant espèces sonnantes et trébuchantes, alors que c'est naturellement parce que les positions modérées de ces éducatrices sur la question des comics étaient connues que les éditeurs les embauchèrent comme consultantes, et qu'il n'y a aucune raison de douter de leur intégrité et de leur zèle dans l'accomplissement de leur tâche. En second lieu, Wertham présente l'affaire sous l'angle du complot démasqué et note que la commission d'enquête sénatoriale a révélé que « les personnes suivantes, qui sont considérées comme des critiques indépendants par le public, sont ou ont été employés par le secteur des comics » (1) , alors que les intéressées n'ont - et pour cause - jamais fait mystère de leur activité : leurs noms figuraient au contraire en bonne place dans les comic books qu'elles contrôlaient, comme une caution scientifique (ce que Wertham leur reproche d'ailleurs aussi !).
Nous dirons pour conclure que Nyberg manifeste une certaine prudence dans son analyse de Wertham. Tout en cautionnant sa méthodologie, elle relève que sa stratégie argumentative n'a rien de scientifique et que son entreprise elle-même relève clairement de l'intervention sociale et non de la recherche.
D'autres auteurs vulgariseront la position de Nyberg pour aboutir à de véritables apologies du docteur Wertham. Nous nous contenterons ici de deux exemples pittoresques émanant tous deux des popular culture studies.
Reibman (James E. Reibman, « Fredric Wertham : A Social Psychologist Characterizes Crime Comic Books and Media Violence As Public Health Issues », John A. Lent (éd.), Pulp Demons : International Dimensions of the Postwar Anti-Comics Campaign, Fairleigh Dickinson University Press/Associated University Presses, 1999) est responsable des archives Wertham et il est parfaitement excusable, à ce titre, de se prendre sporadiquement pour Wertham.
Reibman écrit : « ... The publishing history of [Seduction of the Innocent] and vilification Wertham personally endured are anything but democratic. For example, the Book of the Month Club selected [Seduction of the Innocent] as an alternate choice and planned to run in its club newsletter a favorable review by Clifton Fadiman. However the Club abruptly cancelled both the offering and the review. »
Autrement dit, ce n'est pas Wertham qui se rend coupable d'une tentative de censure en voulant introduire une législation anti-comics. Ce sont au contraire les clubs du livre qui « censurent » l'ouvrage de Wertham en ne le sélectionnant pas !
« More disturbing was the news Wertham received from many bookstores and outraged book buyers who found their copy of [Seduction of the Innocent] had pages 399 and 400 missing. These pages contained the bibliographical notes where Wertham has listed the publishing sources for the book's illustrations. Apparently, Wertham's own publisher, Rinehart and company, succumbed to pressure from both comic book publishers and distributors and agreed to have the offending pages excised. Thus, a finished book was mutilated, neither with the knowledge nor the consent of the author. »
On sait que ce feuillet a été coupé par l'éditeur lui-même, dans la plupart des exemplaires, vraisemblablement par crainte de procès en diffamation de la part des éditeurs de comics. Reibman propage ici la légende selon laquelle ce feuillet manquant contiendrait les références bibliographiques, c'est-à-dire la liste des comics dont Wertham cite les textes, reproduit les images et résume les intrigues. Mais l'examen révèle que le feuillet en question consiste en une simple liste des principaux éditeurs de comics avec la mention sibylline : « These are the names given as publishers on the comic books quoted or referred to in the text. »
Pour finir, Reibman mime la position de Wertham en notant que les comics ne sont pas moins dangereux de nos jours qu'il y a cinquante ans, et que leurs éditeurs (qui devraient raser les murs) continuent à publier des caricatures du Dr Wertham lui-même. Comble de cynisme, ils publient leurs ordures sous le titre même de l'ouvrage de Wertham, en le détournant.
« Today both the vilification of Wertham and the harmful effects of violent comics continue. (...) Eclipse Comics published in November 1985 a lurid series of books under the cover title Seduction of the Innocent ; and vicious caricatures (2) of Dr Wertham appear in many comic books. » (Pour toutes ces citations, Pulp Demon, op. cit., p. 252-254)
Patanella (Daniel Patanella, « The Persuasive Techniques and Psychological Validity of Seduction of the Innocent », International Journal of Comic Art, vol. 1, n° 2, fall 1999, p. 76-85.), tout comme Nyberg, sa principale source d'inspiration, semble admettre au moins par accès que Wertham a délibérément trompé l'opinion, même s'il défend par ailleurs l'intérêt des travaux du psychiatre. Patanella note que le livre de Wertham a certainement paru extrêmement convaincant « pour un non professionnel, qui n'a été formé ni au débat ni à la technique argumentative », mais qu'un universitaire ne peut pas ne pas remarquer que Wertham use d'artifices rhétoriques tels que le raisonnement par analogie. Wertham note par exemple qu'on n'a pas à se demander si certains comics sont plus mauvais que d'autres, pas plus qu'on n'a à classer les ufs pourris en fonction du degré de gêne intestinale qu'ils occasionneront (Seduction of the Innocent, p. 85) ; un tel argument ne prouve rien, constate Patanella, étincelant, précisément parce que les comics ne sont pas des ufs. Patanella rejoint ensuite la thèse de Nyberg : l'utilisation par Wertham de techniques projectives n'est pas en elle-même anti-scientifique, même si l'absence d'études statistiquement contrôlables empêche une évaluation de ses résultats. « Pour un non professionnel, peu formé au raisonnement scientifique, les preuves apportées par Wertham peuvent sembler indiscutables. Pour un scientifique cherchant à valider empiriquement une théorie, il il n'y a là guère plus qu'une intéressante étude exploratoire. » L'auteur conclut finalement que Wertham a eu raison sans le savoir, car la psychologie a par la suite clairement établi que les médias influençaient le comportement de leurs consommateurs, et qu'ils représentaient en particulier pour les enfants une formation accélérée à la violence. En dernière analyse, ajoute Patanella, Wertham a commis l'erreur de ne pas publier ses articles dans des revues dont les articles sont évalués par une commission de spécialistes (peer-reviewed), erreur sans laquelle il figurerait comme il le mérite dans les histoires de la psychologie sociale. Patanella va jusqu'à faire le parallèle avec Freud, qui lui aussi a élaboré son modèle du psychisme enfantin sans véritable étude statistique de vrais enfants !
Une telle analyse laisse pantois et il est difficile de qualifier les présupposés de ce que l'auteur présente lui-même comme une publication scientifique ! Pour Patanella, il y a deux sortes de personnes : les non scientifiques, qui sont des idiots et qui croient tout ce qu'ils lisent, et les scientifiques, dont Patanella lui-même, qui étaient eux aussi initialement des idiots, mais qui ont été formés au raisonnement scientifique et sont de ce fait devenus capables de déceler les artifices rhétoriques d'un auteur (non sans quelque difficulté, car Patanella précise qu'à première lecture les arguments de Wertham lui semblent convaincants !). On est donc ramené à la distinction de Nyberg entre d'une part le grand public (qui comprend en particulier les enseignants et les bibliothécaires), naïf et incapable d'une appréciation critique, et d'autre part les savants, qui sont à même de porter un jugement étayé et d'établir par des méthodes indiscutables une vérité scientifique. Apparemment, il n'est pas venu à l'idée de Patanella que Wertham est passé pour ce qu'il est - un pamphlétaire haineux et un agitateur populiste - pour beaucoup de lecteurs d'intelligence et de culture moyennes qui n'étaient pas acquis d'avance à ses thèses ! Après tout, Wertham lui-même consacre une partie importante de son livre à batailler avec les « tièdes », c'est-à-dire les gens qui trouvent que le problème des comics est résolu une fois qu'on admet que les crime comics ne sont pas destinés aux jeunes enfants et qu'on veille à ce que ces comics restent hors de leur portée.
Reprocher à Wertham une
tendance à la grandiloquence et une méthodologie
scientifique valide mais difficilement testable revient à
reprocher à Jack l'éventreur de pratiquer dans ses
lettres aux journaux un sensationalisme peu compatible avec la
dignité d'un gentleman et d'avoir violé les
règlements sanitaires qui interdisent l'abattage en dehors des
boucheries !
En second lieu, on est bien obligé de constater que Patanella use lui-même d'un artifice rhétorique en feignant de considérer que le problème de Wertham est d'une part une mauvaise méthodologie, qui le rend incapables de démontrer des thèses qui sont justes par ailleurs, et d'autre part une tendance à user d'effets de manche ou de méthodes argumentatives peu compatibles avec la présentation d'un travail scientifique. Patanella observe ainsi que Wertham, dans ses citations d'images traumatisantes, fait tissu de bons exemples (ce qui illustrerait bien la volonté argumentative, au détriment de la méthode scientifique) et il suggère qu'une étude de contenu d'un échantillon représentatif de comics aurait été plus probante. Ce faisant, Patanella passe complètement sous silence le fait que Wertham recourt systématiquement à l'affabulation quand il rend compte des comics.
Reprocher à Wertham une tendance à la grandiloquence et une méthodologie scientifique valide mais difficilement testable revient à reprocher à Jack l'éventreur de pratiquer dans ses lettres aux journaux un sensationalisme peu compatible avec la dignité d'un gentleman et d'avoir violé les règlements sanitaires qui interdisent l'abattage en dehors des boucheries, tout en portant à son crédit d'avoir une conscience claire (et très en avance sur son époque) du problème social que représente la prostitution !
Enfin, achever comme le fait Patanella sur la remarque que Wertham n'a eu que le tort de ne pas publier ses travaux dans des revues peer-reviewed défie proprement la raison. Il se trouve, n'en déplaise à Patanella, que Wertham a publié une partie de ses diatribes dans des revues médicales comme l'American Journal of Psychotherapy, ce qui ne change évidemment pas d'un iota le statut scientifique du psychiatre ni la validité de ses propos !
Le texte de Patanella est un exemple extrême, car l'auteur ignore manifestement de quoi il parle. Le texte de patanella est néanmoins typique, dans son ineptie, du discours visant à réhabiliter Wertham. Ce discours procède d'une intention de blanchir l'auteur de Seduction of the Innocent, en niant qu'il ait été un polémiste, un menteur et un charlatan, toutes accusations qui seraient propagées par un fandom avide de revanche. Pour ce faire, les défenseurs du psychiatre drapent Wertham, et se drapent eux-mêmes, dans la toge du savant, afin d'établir que sa méthode relève d'un modèle canonique, ce dont un lecteur profane ne peut par définition pas juger, et en conséquence que ses conclusions sont, sinon vérifiables, du moins scientifiquement valides. (3)
Une telle attitude est plus proche d'un cléricalisme que d'une attitude scientifique, car ceux qui l'adoptent considèrent 1. qu'ils sont les seuls détenteurs de la vérité, car ils s'appuient sur les bases de la doctrine (la mise en évidence par les sciences sociales de la dangerosité de la fiction destinée aux masses), et 2. que leur rôle est de valider les résultats qui s'appuient sur ces bases, sans prendre position sur la qualité des travaux. On vérifiera facilement la nature théologique de la question en demandant à ses défenseurs ce que Wertham aurait dû faire à leur avis pour se déconsidérer. Si même la fraude délibérée et systématique est qualifiée d'« intéressante étude exploratoire », il est clair qu'il n'y a aucun moyen de faire fléchir ses défenseurs.
Se situant sans nuance dans le registre de l'apologie, Reibman et Patanella représentent naturellement des cas extrêmes. D'un autre côté, force est de constater que l'opinion du spécialiste académique moyen au sujet de Wertham est empreinte d'une curieuse mansuétude, culminant dans une sorte d'incompréhension teintée de sympathie. Un spécialiste britannique des comics, Martin Barker (écrivant dans John A. Lent, Pulp Demons : International Dimensions of the Postwar Anti-Comics Campaign, op. cit.), dont l'attitude dominante est pourtant un scepticisme de bon aloi, et qui est capable dans ses écrits de dénoncer un certain « élitisme de gauche », note que la question n'est pas de savoir si Wertham s'est trompé sur les comics. La question est de savoir comment il a pu se tromper de la sorte, alors qu'il était, par ailleurs, tellement intelligent, tellement généreux, et d'opinion tellement avancée.
C'est peut-être ici qu'est la difficulté. Alors que tous les auteurs académiques précisent, en réaction contre les caricatures du fandom, que Wertham n'est pas un adversaire borné des comics, mais qu'il est préoccupé d'action sociale, personne, à notre connaissance, n'a trouvé le courage de franchir la ligne invisible, et ne s'est demandé si le généreux Wertham, qui a eu tellement tort au sujet des comics, n'a pas eu tort également de conclure que la délinquance des mineurs tenait à des causes exclusivement sociales ! Crainte peut-être de trouver que la pensée de Wertham est, pour emprunter une phrase à un célèbre théoricien des littératures dessinées, « un de ces systèmes comme on en invente aujourd'hui tous les six mois dans le but exprès d'expliquer pourquoi les scélérats tuent leur prochain sans qu'il y ait de leur faute, et pourquoi les gens de bien les font pendre sans en avoir le droit. » (Rodolphe Töpffer, Essais d'autographie, 1842).
Harry Morgan
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NOTES
(1) Le rapport intérimaire de 1955 de la commission d'enquête sénatoriale évoque un « doute raisonnable » quant à l'objectivité de la Child Study Association, à laquelle appartient Josette Frank, au motif que l'association a passé sous silence la vague des crime comics et des horror comics, parle d'un « sérieux problème éthique » au sujet des liens financiers de la Child Study Association, et de Josette Frank personnellement, avec un éditeur de comics, et conclut que l'association ne peut se targuer d'objectivité et d'impartialité. Quoique exprimé en langage diplomatique, il y a ici un blâme qui semble directement inspiré des positions de Wertham. Retour au texte
(2) La mention des vicious caricatures cherche peut-être à obtenir un effet de sympathie et d'indignation, en référant à des caricatures antisémites (Wertham était juif). Mais beaucoup des auteurs de comics avec qui Wertham s'est colleté par publications interposées étaient juifs aussi. De plus, la littérature fanique ne fait aucune allusion à la judéité de Wertham. Retour au texte
(3) On décèle ici une distinction de classe. Les amateurs de comics, type même d'art et de littérature lowbrow, ne pourraient par définition accéder à une véritable vision critique, qui relève du highbrow et par conséquent de la littérature savante. Selon Patanella, les fans de comics qui vitupèrent Wertham n'auraient en réalité pas lu son livre, car il n'a jamais été réédité avant 1999 et cote 300 dollars. (Nous ignorons d'où Patanella tire ces informations ; le livre de Wertham a été réédité en 1972 et en 1996 ; l'édition originale, au moment où écrit Patanella, se paie aisément 1500 dollars.) De façon caractéristique, l'idée que des non universitaires puissent avoir accès à une bibliothèque publique et une photocopieuse n'a tout simplement pas effleuré Patanella ! Retour au texte