Stripologie : un glossaire

Harry Morgan


Le but de ce glossaire est d'éclairer le sens des mots dans nos articles, qui portent, rappelons-le, sur la théorie de la bande dessinée. Aucun effort n'a été fait pour donner des définitions générales. L'attribution à des auteurs (Groensteen, Peeters. etc.) concerne en principe le domaine des littératures dessinées. Le mot ne constitue pas forcément un néologisme et il a pu être emprunté, dans un sens proche, à un théoricien d'une autre discipline (généralement la sémiologie). Certaines entrées sont celles de notre ouvrage Le Petit critique illustré (PLG, 1997). Le reste (et une partie des précédentes) figurera dans le glossaire de nos Principes des littératures dessinées (à paraître). Les mots munis d'un * sont définis dans ce glossaire.

 

Age d'or : Pour les anciens lecteurs d'illustrés* français, période allant de 1934 (lancement du Journal de Mickey) à la guerre (fin de la parution desdits illustrés en zone libre), qui permit à une génération de bambins de découvrir les comic strips* américains. L'âge d'or est donc l'âge d'or des périodiques français pour enfants.

Cependant, par un glissement de sens peut-être inconscient, on parla de l'âge d'or de la bande dessinée (ou de bandes dessinées de l'âge d'or), en voulant désigner les années 1930 aux Etats-Unis.

La notion est sujette à caution. Nombre de séries « de l'âge d'or » furent créées bien avant les années 1930 (Pim Pam Poum, Popeye [Thimble Theater],Mutt and Jeff, etc.). Dans leur pays, les bandes « de l'âge d'or » survécurent évidemment à la guerre - et certaines paraissent toujours, soit qu'elles n'aient jamais cessé, soit qu'elles aient été relancées. Enfin et surtout, on ne voit aucune raison objective de privilégier une décennie de l'histoire des comic strips*.

On notera que, pour les Américains, l'âge d'or du comic strip* est antérieur (et parfois très antérieur) aux années 1930, ce qui provoque de perpétuels dialogues de sourds entre amateurs, de part et d'autre de l'Atlantique. L'âge d'or recouvre les années 1910 pour Jerry Robinson (The Comics, 1974), la période de 1914 à 1930 pour David Manning White.

Les comic books* ont eux aussi un âge d'or (1938-45 ou 1938-49) et un âge d'argent (1957-67 ou 1956-69).

 

Analogique : Basé sur l'analogie. En particulier, une représentation analogique, ou analogon, nous montre les choses elles-mêmes, au repos (par exemple une photo, une illustration ou une peinture réaliste) ou en train de se faire (un film, une pièce de théâtre). Barthes note avec perplexité que l'analogon est un message sans code*.

Analogique a un autre sens en théorie de la communication. Il désigne alors le fait que les données sont représentées par des variables physiques continues et comporte donc l'idée d'absence d'unités élémentaires ; en ce deuxième sens, analogique s'oppose à digital (qui signifie : composé d'unités discrètes* ou digits).

Les deux sens sont souvent confondus par les sémiologues : analogique signifie alors à la fois « ne comportant pas d'unités discrètes » et « basé sur l'analogie ». L'image présente effectivement les deux caractéristiques, mais on ne gagne rien à ce type de confusions.

 

Ancrage (Barthes) : Voir relais*.

(Nous-même) : Fait pour le lecteur de se raccrocher en permanence à une image, caractéristique de la littérature dessinée*.

 

Aniconète (Peeters) : Etat de celui qui est incapable de lire une image, en particulier une image de BD. Dans le cas de la BD, l'aniconète demande souvent ce qu'il convient de lire en premier, des textes ou des dessins. (La meilleure réponse à cette question est celle de Louis Armstrong au journaliste qui lui demandait de définir le jazz : « Si vous avez besoin de le demander, vous ne le saurez jamais. ») Le fait d'être aniconète n'empêche heureusement pas de prononcer sur la BD, le plus souvent pour la condamner comme forme inférieure, populaire, mixte, hybride, paralittéraire, infralittéraire, biscornue, pousse-au-crime, etc.

 

Arbitraire : Pour Saussure, le signe linguistique se caractérise par le lien arbitraire entre le mot et la chose. L'arbitraire s'oppose à la motivation*.

 

Art de masse (art populaire) : Forme d'expression bénéficiant de moyens de diffusion industriels et touchant un large public. Dans le cas du récit imprimé, on parle aussi de littérature de masse ou de littérature populaire, dans laquelle il faudrait compter la littérature dessinée. On a souvent supposé que les arts ou les littératures populaires présenteraient certaines caractéristiques de structure ou de contenu, mais celles-ci sont difficiles à cerner.

 

Arthrologie (Groensteen, d'après Ricardou, mais le terme apparaît déjà chez Barthes) : Science des articulations*, en l'occurrence celles des matériaux iconiques et linguistiques de la bande dessinée.

L'arthrologie restreinte est axée sur les séquences de vignettes. L'opération fondamentale de l'arthrologie restreinte est le découpage* du contenu narratif.

L'arthrologie générale recouvre des relations translinéaires ou distantes, se déclinant selon les modalités du tressage*.

Voir mise en page*, dispositif spatio-topique*.

 

Articulation : En linguistique, découpage dans l'un ou l'autre ou les deux plans du signe. La première articulation est celle des unités de sens*, la seconde articulation est celle des unités distinctives* (voir à unités*). On distingue :

• des codes sans articulation : codes à sème unique [la canne blanche désigne l'aveugle, son absence ne signifie rien, car tous les aveugles ne portent pas de canne ; il y a donc deux signes, canne et absence de canne, le second ne signifiant rien] et codes à sème zéro [le pavillon du vaisseau amiral est hissé quand l'amiral est à bord ; son absence signifie que l'amiral n'est pas à bord] ;

• des codes à première articulation : il y a des unités de sens, mais elles ne se décomposent jamais en unités purement distinctives. Autrement dit, le découpage est le même dans les deux plans du signe ; on dit aussi que les deux plans du signe sont conformes. C'est le cas de l'algèbre : tous les signes désignent soit une valeur, /1/, /2/, soit une opération /+/, /=/. C'est aussi le cas de l'image : le dessin d'un œil se décompose en un /point/ qui signifie « pupille » et une /amande/ qui signifie « contour de l'œil » ;

• des codes à deuxième articulation : il y a des unités distinctives*, mais ce sont les unités de sens* qui ne se décomposent pas : un exemple (donné par Prieto) est le sémaphore, où le marin utilise les deux bras pour brandir ses drapeaux, ce qui signifie que chaque signal se décompose en deux positions de bras qui n'ont pas de signification individuelle ; mais le signifié est unique et ne se décompose pas, car chaque signal désigne une lettre de l'alphabet) ;

• des codes à double articulation ou codes biplanes : le découpage est différent dans les deux plans du signe, autrement dit, il existe à la fois des unités de sens* et des unités distinctives* ; c'est le cas - et, pour certains linguistes, l'apanage - des langues naturelles.

Pour Groensteen, articulation signifie : toute opération consistant à organiser des ensembles d'unités* fonctionnant au même niveau. (cf. Roger Odin, Cinéma et production de sens, Armand Colin, 1990) Voir arthrologie*.

 

Ballon  : En anglais  : Balloon. Espace le plus souvent patatoïde et muni d'une queue où l'on inscrit les paroles d'un personnage. Le contour devient duveteux et la queue est remplacée par une suite de petits cercles quand le ballon contient des pensées. Les francophones parlent plus souvent de bulles. L'équivalent savant est phylactère*, du nom d'une amulette contenant un passage de l'Ecriture que les juifs se nouent au bras et au front quand ils prient, désignant par extension toute banderole à inscription du moyen âge et de la Renaissance (mais au moyen âge elles contiennent rarement les paroles du sujet !) - et, avec beaucoup de bonne volonté, les premiers ballons utilisés dans les estampes. Terme popularisé par les premiers exégètes de la bande dessinée et dont le moins qu'on puisse dire est qu'il ne s'imposait pas.

 

Bande dessinée (pour la plupart des auteurs) : récit dessiné conduit par une succession de vignettes. Sont souvent rajoutés les critères suivants : 1. La séparation et la juxtaposition des vignettes ; 2. la prépondérance de l'image sur le texte ; 3. l'usage du ballon (les bandes dessinées avec texte sous l'image sont baptisées alors histoires en images*).

(Pour nous-même) : Partie de la littérature dessinée* qui conduit un récit par une pluralité d'images dont plusieurs sont coprésentes sur la même page. (Notre définition correspond donc à celle qui précède, assortie du critère n° 1).

 

Bande dessinée pour adultes : Toute bande dessinée qui n'est pas destinée au premier chef aux enfants, par exemple une bande de Töpffer, de Gustave Doré, de Marie Duval (Ally Sloper), d'André Daix (professeur Nimbus), de Druillet. Le newspaper strip appartient donc en entier à la bande dessinée pour adultes. C'est vrai aux Etats-Unis et dans le reste du monde, et quels que soient les genres considérés, par exemple un family strip, un girl strip, un soap opera, la planche dominicale des Katzenjammer Kids, etc. En Europe, l'expression bande dessinée pour adultes désigne souvent des bandes érotiques.

 

Beaux-arts : La musique, la peinture, la sculpture, l'architecture, l'éloquence et la poésie. On ajoute parfois la danse.

 

Belles-lettres : La grammaire, l'éloquence et la poésie.

 

Big Little Books : Curieux petits bouquins apparus dans les années 1930 et 1940, de format carré et très épais comportant en belle page une case d'un comic strip privée de ses bulles (remplacées par un hachurage) et parfois recadrée, en fausse page, un texte romanesque continu. Les premiers Big Little Books furent publiés par Whitman, mais la formule fut rapidement imitée.

 

Cartoon : Désigne à la fois le dessin d'humour, la bande dessinée* (cartoon strip) et le dessin animé* (animated cartoon). Les auteurs sont des cartoonists.

 

Code : En sémiologie, un système arbitraire* de signes. La notion de code implique premièrement qu'on découvre un système formel qui soit complexe (il n'y a pas de code réduit à un signe) et cohérent (les éléments sont reliés entre eux par des lois de fonctionnement invariables, certaines associations sont permises et d'autres non), deuxièmement que la description complète de ces codes restitue le fonctionnement du récit. Selon Barthes, Eco, etc., code s'emploie de préférence à langage en l'absence de double articulation* (voir articulation*). Voir langage*.

En histoire de l'art : un ensemble de conventions (par exemple le fait que l'on lise une suite d'images de gauche à droite en Occident, ou le fait que le nez d'un personnage comique soit figuré par un petit cercle).

 

Coexistence : La constatation que texte et image sont (le plus souvent) présents tous deux dans la littérature dessinée*. Voir inséparabilité*.

 

Comic book : Aux Etats-Unis, fascicule le plus souvent en couleur, à parution le plus souvent mensuelle, traditionnellement imprimé sur mauvais papier, à un prix généralement faible. Pour les séries réalistes, contient en général un épisode d'une histoire à suivre, pour les histoires humoristiques, une histoire complète, parfois complétés par une seconde histoire appelée back-up.

 

Comic strip : Aux Etats-Unis, bande dessinée distribuée par une agence de presse et publiée dans la presse quotidienne. A suivre (continuity strip) ou contenant un gag par livraison (stop comic ou gag-a-day strip).

En semaine (en général du lundi au samedi), paraît sous forme de bande quotidienne (daily strip), c'est-à-dire d'une bande horizontale le plus souvent de trois ou quatre vignettes, en noir et blanc. Mais les tabloïdes, les magazines et la presse non-américaine reproduisent souvent des daily strips hors de leur date marquée, en les coloriant.

Le dimanche, paraît sous forme de planche du dimanche (sunday page), ensemble de strips en couleur, susceptibles de subir des remontages complexes. De nos jours, les journaux américains publient les sunday pages à l'italienne, et casent entre deux et cinq sunday pages par page de journal. La modification la plus fréquente consiste à publier la sunday page en deux strips au lieu de trois, qu'on peut considérer comme le format de base, en abandonnant le premier strip, - c'est-à-dire le titre et, le plus souvent, une case contenant un clin d'œil ou un gag indépendant. Mais il arrive aussi qu'une sunday page composée de six cases de même taille soit publiée verticalement.

Il existe d'autre part un format « page entière », permettant de publier le contenu des trois strips (à l'italienne) sur quatre strips (à la française). Dans certains cas, une case stratégique disparaît dans le processus, mais le plus souvent un découpage ingénieux permet ce remontage sans perte de matière. Le format « page entière » est réservé, le cas échéant, à la compilation en livre et les sunday pages ne sont donc vraiment des pages que dans les cas rares où elles ont les honneurs d'une édition. Il n'en allait pas de même autrefois, où la sunday page disposait d'une page entière et était accompagnée d'une bande complémentaire, au-dessus (top) ou au-dessous (bottom) de la bande principale.

Dans le cas de séries « à suivre », les livraisons quotidiennes et dominicales peuvent se suivre (Dick Tracy, Rex Morgan M. D.) ou raconter des histoires indépendantes (Alley Oop). Certains strips existent uniquement sous forme de daily strips (Executive Suite) ou uniquement sous forme de sunday pages (Prince Valiant).

Enfin, certaines séries disposant d'une sunday page sont réduites à un dessin en semaine, analogue à un dessin d'humour mais à personnages récurrents). D'autres existent sous forme de dessin isolé en semaine comme le dimanche. Voir panel*.

 

Comics : Equivalent de bande dessinée en américain. Des synonymes sont cartoon et funnies. Les Anglais utilisent parfois l'expression strip cartoon. Comics a été importé en français, en particulier par les éducateurs, qui en font un équivalent d'illustrés*.

 

Comics Code Authority : Organisme professionnel veillant à ce que les comic books ne transforment pas les enfants en brutes homicides, fondé aux Etats-Unis en 1954, dans un souci de relations publiques et pour prévenir les foudres de l'Etat-gendarme.

 

Compartimentage (Groensteen) : Séparation d'une surface (par exemple une page de bande dessinée) en plusieurs espaces contigus.

 

Complémentarité (nous-même) : Un des éléments de l'intrication*. En bande dessinée comme dans le texte romanesque, nous appellons complémentarité une répartition des rôles entre le texte et le dessin, réservant relais* à un renvoi explicite de l'un à l'autre (comme dans la course du même nom, où les coureurs se passent un bâton). Quand il y a complémentarité, il est possible de supprimer l'un des éléments, texte ou dessin, à condition qu'il ne remplisse pas de fonction essentielle.

 

Connotation (Barthes d'après Hjelmslev) : Un système connoté est un système dont le plan d'expression est constitué lui-même par un système de signification (présentant par conséquent la dichotomie plan de l'expression/plan du contenu). Dans la connotation, le couple signifiant/signifié devient donc le signifiant d'un nouveau signifié « général, global et diffus ». Par exemple, dans une réclame pour les pâtes Panzani rendue célèbre par Barthes, le signifiant /Panzani/ (qui signifie « Panzani »), le signifiant /couleurs dominantes vert, blanc, rouge/ (qui signifie « couleur dominante vert, blanc, rouge ») et les /ingrédients/ (qui signifient « ingrédients ») signifient en plus, à eux tous et globalement, l'italianité des pâtes Panzani (signifié de connotation), et deviennent dès lors des connotateurs, signifiant respectivement « nom à consonnance italienne », « couleurs du drapeau italien » et « légumes typiques d'une cuisine du sud ». Voir dénotation*.

 

Conventionnalisme : En sémiologie de l'image, la croyance que les modalités de la représentation et plus généralement l'ensemble des codes* graphiques sont essentiellement arbitraires*.

 

Cycles de dessins : Voir histoires en images*, littérature dessinée*.

 

Daily strip : Voir comic strip*.

 

Découpage : Pour la plupart des auteurs, tout ce qui concerne le contenu et la succession des vignettes. L'étude du découpage est souvent inspirée de la théorie du cinéma et fait intervenir des notions de cadrage, de montage, de rythme, etc.

Pour Groensteen, séparation du contenu narratif en paquets discrets, dont l'étude relève de l'arthrologie*.

 

Dénotation (Barthes d'après Hjelmslev) : relation entre un signifiant et un signifié, ou entre plan de l'expression et plan du contenu. Dans le cas de l'image, signifiant et signifié seraient dans un rapport « quasi tautologique » ou dans la position d'une « quasi-identité », ce qui contredit le caractère arbitraire* du lien de signification. Voir Connotation*.

En sémiotique de l'image, dénotation (au sens de Jakobson) signifie aussi, beaucoup plus justement, relation entre un signe et un référent (et non entre un signifiant et un signifié). On sort alors du strict cadre de la signification.

 

Dessin animé (en abrégé DA) : Au cinéma, à la télévision et sur des supports magnétiques (cassette vidéo) ou à lecture optique (vidéodisque), film réalisé à partir d'une série de dessins représentant les phases successives d'un mouvement. Appartient au domaine de l'animation, qui utilise par ailleurs de nombreuses techniques différentes et les mêle éventuellement.

Souvent confondu par le grand public avec la bande dessinée.

 

Dime novel : Roman populaire vendu en fascicule de grand format, d'une trentaine de pages, avec texte sur deux colonnes, populaire aux Etats-Unis de la moitié du 19e siècle au début du 20e. Contient souvent un western. Précède les pulps*.

 

Discret, discrète : Séparé(e), composé de parties séparées, par exemple les signes élémentaires qui constituent un message, ou les cases d'une bande dessinée.

 

Dispositif (nous-même) : Agencement spatial d'une forme quelconque de littérature dessinée (par exemple un strip, une gravure en pleine page d'un roman en gravure, la planche compartimentée d'un album européen, la surface librement agencée d'une page d'un graphic novel). La répartition spatiale du texte rentre dans le dispositif. Un strip avec bulles et un strip avec texte sous l'image appartiennent donc à deux dispositifs différents, mais cela ne signifie pas que l'histoire soit découpée de façon différente. (Voir découpage*).

Dans un sens plus restreint, toute disposition de dessins et de textes amenant le lecteur à se référer constamment au dessin et constituant la production en question en littérature dessinée. Notre notion du dispositif diffère donc du dispositif spatio-topique* de Groensteen.

 

Dispositif spatio-topique (Groensteen) : La distribution spatiale des vignettes d'une bande dessinée, observable dans le multicadre* (l'assemblage de cadres et de bulles vides de la planche). L'opération fondamentale de la spatio-topie est la mise en page*. Voir arthrologie*, découpage*.

 

Ecole : Caractères communs de certaines œuvres littéraires ou artistiques. L'école du Connecticut, réunie autour de Mort Walker et Dik Browne, est caractérisée par un style à gros pieds, des personnages pris sur le vif et une satire bon enfant de la société américaine, avec des strips comme Beetle Bailey, Hi and Lois, Hagar the Horrible, etc. L'école du Herald couvre en gros la période 1905-1915 et regroupe les bandes oniriques parues dans le New York Herald de James Gordon Bennett puis d'autres journaux (Little Nemo in Slumberland de McCay, The Explorigators de Harry Grand Dart,Mr. Twee Deedle de John Gruelle, etc.). L'école du New Yorker désigne, en bande dessinée, un style géométrique très stylisé et qui ne recourt pas aux gros pieds (The Smythes de Rea Irvin, The Little King d'Otto Soglow, etc.), dans le cartoon humoristique, des dessins à la légende réduite et à l'humour subtil, parfois nonsensique (Thurber, Booth, etc.).

 

Fandom : Mot-valise d'origine américaine. Domaine des fanatiques. Ensemble des amateurs d'un domaine (par exemple, la bande dessinée), se manifestant par l'intermédiaire des fanzines, plus rarement de livres, et, en chair et en os, dans les conventions, festivals et autres manifestations. Le fandom est supposé peser sur les décisions des éditeurs en plébiscitant certaines séries, en réclamant des traductions ou en vitupérant les insuffisances d'une publication. En France, l'influence réelle du fandom est à peu près nulle, les éditeurs se comportant comme s'il n'existait pas.

 

Fanéditeur : Mot-valise. Editeur, rédacteur en chef et parfois rédacteur unique d'un fanzine. Le fanéditeur est en général enthousiaste, érudit, collectionneur, pauvre et opiniâtre. Il excelle dans la bibliographie, la nomenclature, la recension (de préférence exhaustive) et n'en finit pas de faire le catalogue de sa bibliothèque.

 

Fanzine : Mot-valise d'origine américaine. Magazine de fanatique. A l'origine, lettre circulaire échangée entre amateurs d'un domaine (au début : la science-fiction). A l'heure actuelle, fanzine désigne toute revue non professionnelle, c'est-à-dire ne faisant pas vivre ses auteurs. D'abord ronéoté, voire tiré à la duplicatrice à alcool, le fanzine est, de nos jours, photocopié ou imprimé, parfois luxueusement. Financé par les auteurs, souvent regroupés en association, et/ou avec l'aide d'un organisme quelconque (Centre national du livre, MJC, Conseil général, etc.), diffusé par voie postale, par démarchage direct des librairies spécialisées ou par un véritable diffuseur, il présente le plus souvent, dans notre domaine, un mélange de bande dessinées d'amateurs et de dossiers sur des auteurs, généralement assortis d'interviews et de croquis inédits. Mais certains fanzines sont des revues d'études, d'information, de réflexion, voire de polémique. D'autres sont des magazines de bande dessinée, en général émanation d'un groupe d'artistes. D'autres encore sont l'œuvre de fous littéraires ou, à tout le moins, de folichons et de saugrenus  ; écrits et dessinés par une personne, ils traitent alors exhaustivement des engouements de leur auteur, de façon le plus souvent obscure, allusive et morose, et pour un public imaginaire.

Zine (parfois écrit zeen) est une abréviation de magazine - et non, comme on pourrait le croire, de fanzine, dont il est, au contraire, l'origine ! Zine est excellemment défini par l'équipe du magazine Wired1 comme « un ouvrage modeste, bon marché, autopublié  ; version underground*, anarchiste d'un magazine. » Des dérivés de zine sont fanzine, e-zine (fanzine électronique) et webzine (fanzine sur Internet).

 

Fascicule : Toute partie d'ouvrage publié par livraisons. Dans notre domaine, tout périodique consacré aux bandes dessinées*, récit complet*, petit format*, comic book*, etc.

 

Fascicule de gare : Equivalent de petit format. Généralement péjoratif, les bibliothèques de gare étant supposées des lieux de perdition et - contre toute logique - des propagatrices de l'analphabétisme.

 

Forme (Hjelmslev) : Hjelmslev distingue le plan de l'expression et celui du contenu, ce qui lui permet de subdiviser la distinction saussurienne du signifiant (correspondant à l'expression) et du signifié (correspondant au contenu). La forme de l'expression est constituée par les rapports combinatoires possibles entre les plus petites unités phonétiques, c'est-à-dire les phonèmes. La forme du contenu est constituée par les relations entre les plus petites unités de sens. Elle correspond dans chaque langue à des facteurs différents mis dans un ordre différent. Par exemple l'esquimau dit « non-sachant-suis-je-cela » là où le français dit « je ne sais pas ». Il existe par ailleurs une substance de l'expression (par exemple la substance phonique d'un message oral) et une substance du contenu (le sens du message). La distinction forme/substance est difficile à retenir car elle n'est pas elle-même du type fond/forme. La substance est ce qui correspond au monde réel, aux deux bouts de la chaîne, l'émission sonore et le sens qu'on veut transmettre. La forme est une notion « abstraite » et correspond à la façon dont chaque plan du signe est structuré.

 

Fumetti : Au singulier, fumetto (petite fumée). Désignation italienne des bandes dessinées, par référence aux ballons. Fumetti s'applique de préférence aux bandes dessinées faites en Italie.

 

Fumetti neri : Bandes italiennes policières pour adultes, publiées dans les années 60/70. Le modèle en est Diabolik, par Angela et Luciana Giussani.

 

Histoire en images (Pour la plupart des auteurs avant 1993) : récit conduit par une succession de dessins, parfois légendés (ou, si l'on préfère, « bande dessinée sans bulle »). Existe toujours, certains auteurs ayant le chic pour se saisir d'une forme d'expression officiellement obsolète et la mener à une nouvelle perfection, au désespoir des tenants d'un progrès en art (voir l'œuvre d'Edward Gorey). On parle aussi d'histoire en estampes, terme forgé par Töpffer.

(Pour nous-même) : Histoire racontée par une succession de dessins. Synonymes : litttérature en images, art séquentiel, récit en images, narration par images fixes, narration séquentielle. Au 20e siècle, la forme habituelle de l'histoire en images est la bande dessinée*. Elle utilise le plus souvent le compartimentage* (la séparation en cases) et la bulle. Mais nous admettons dans les histoires en images les récits qui ne comportent qu'une image par page (cycles de dessins*). Les histoire en images recouvrent donc pour nous les bandes dessinées* plus les cycles de dessins*. Appartiennent à la littérature dessinée*, mais pas aux histoires en images, les récits ne comportant qu'une image en tout et pour tout (par exemple un cartoon*).

Voir Littérature dessinée*.

 

Hypercadre (Peeters) : Le tracé extérieur (généralement discontinu) de la planche de BD. Ne pas confondre avec le multicadre*.

 

Idéologème (Kristeva) : L'idéologème est une fonction intertextuelle, matérialisée « aux différents niveaux de la structure de chaque texte ». « Les fonctions définies sur l'ensemble textuel extraromanesque Te prennent une valeur dans l'ensemble textuel du roman Tr. L'idéologème du roman est justement cette fonction intertextuelle définie sur Te et à valeur dans Tr. »

 

Idiolecte : En sémiologie, un code propre à un auteur, voire à une œuvre.

 

Illusion référentielle : Croyance naïve que l'image (ou toute autre forme d'art) montre la réalité elle-même. Equivalent de l'illusion réaliste (Ricardou) : Prétention à représenter les choses mêmes. (Problèmes du nouveau roman, p. 75 et 87).

 

Illustration : la notion d'illustration intervient dans deux contextes très différents. 1. Dans la définition de la BD. - Un texte accompagné de dessins ne constitue pas automatiquement une bande dessinée. Quand ce n'est pas le cas, on parle d'un texte conventionnel illustré. 2. Dans l'analyse stylistique. - Un certain nombre de dessinateurs réalistes utilise une série de procédés mis au point à la fin du 19e siècle et au début du 20e dans l'illustration de romans et également employés dans l'illustration commerciale. On parle en ce sens de courant ou de tentation néo-illustrative (Peeters).

 

Illustré : Abréviation de journal illustré (désignant ce qu'on appellerait de nos jours la grande presse). Terme impropre appliqué en France, faute d'un meilleur et péjorativement, à la presse de bande dessinée et aux ouvrages de bande dessinée. Les enfants l'adoptèrent, mais sans connotation péjorative.

 

Image narrative (nous même) : image contenant un récit, une succession d'événements reposant sur des rapports de causalité et de consécution.

Voir Image illustrative*.

 

Image illustrative (nous même) : image où il se passe quelque chose sans qu'on puisse clairement rétablir la succession des événements.

Voir Image narrative*.

 

Immotivation : le contraire de la motivation*. Le fait qu'un signe quelconque est arbitraire*.

 

Inséparabilité (nous-même) : Outre leur simple coexistence*, texte et dessin dans les littératures dessinées sont censés se trouver dans certains rapports structurels, qui les rendent inséparables : nous distinguons intrication* et interdépendance*.

 

Interdépendance (nous-même) : Le second des deux degrés d'inséparabilité* du texte et de l'image. Dans l'interdépendance, texte et dessin interagissent et c'est de leur interaction que naît le sens. Des exemples classiques sont l'échange des fonctions entre texte et dessin, la liaison entre les vignettes par le texte ou le dessin, le texte souterrain.

 

Intrication (nous-même) : Le premier de deux degrés d'inséparabilité* du texte et de l'image : dans l'intrication, texte et dessin se complètent, chacun prenant en charge une partie de la narration. Voir complémentarité* et relais*. Voir interdépendance*.

 

Isotopie (Greimas) : Unité de signification (celle par exemple qui intègre un signe et son contexte).

 

Langage (au sens des linguistes) : Forme de communication caractérisée par des unités élémentaires (voir unités*), des rapports arbitraires entre le mot et la chose (voir arbitraire*) et la double articulation (voir articulation*).

 

Lecture : Dans ces pages, lecture de l'image (ou d'une suite d'images) suppose 1. que l'on dégage un sens du (des) dessin(s) 2. en gérant librement son temps. Lecture n'implique pas la présence d'un langage* au sens des linguistes. Voir Temps*.

 

Littérature dessinée (nous-même) : Désigne les récits en image(s) qui passent par le support de l'imprimé ou ses substituts. Les littératures dessinées passent soit par des images uniques (daily panel*, cartoon*), soit par des images séquentielles* (histoires en images*). Nous distinguons dans ces dernières bande dessinée*, définie par la présence de plusieurs images sur la même page, et cycle de dessins*, quand les images sont liées mais ne sont pas sur la même page (cycles de gravures de Callot, de Goya, de Hogarth, de Cruikshank, romans gravés de Masereel, de Lynd Ward, de Charles Dana Gibson, de Martin Vaughn-James, etc.)

On peut aisément passer de la bande dessinée* au cycle de dessins* par remontage.

 

Littérature populaire : Voir Art de masse*.

 

Manga : Désignation japonaise des bandes dessinées. S'applique à la bande dessinée japonaise, et éventuellement à des bandes dessinées occidentales ressemblant aux bandes dessinées japonaises. Le terme, créé par Hokusaï (qui ne faisait pas de bandes dessinées !), suggère une notion de caprice et de drolatique. Les dessinateurs de séries réalistes et dramatiques préfèrent celui de gekiga (BD-drame). Les auteurs de manga ou de gekiga sont des mangaka.

 

Médium : En français courant : média au singulier, médias au pluriel. (Nous écrivons, sans beaucoup de logique, un médium, des médias, avec s.) Mot d'origine latine ayant transité par l'anglais  ; moyen de communication. On distingue les moyens de communication de masse ou mass-media (en français : médias de masse ou médias), et les moyens de communication personnels (souvent appelés, en toute contradiction, « hors média »).

Dans le cas de la bande dessinée, l'emploi du mot est sujet à caution, car la bande dessinée ne correspond pas à un moyen de diffusion spécifique. Un fanzine discret, reproduit par photocopie et diffusé par voie postale, s'apparente à une lettre circulaire. Une bande dessinée éditée (le plus souvent sous forme d'album) est distribuée dans les mêmes points de vente que le livre et s'apparente à ce dernier produit, tandis qu'une revue de bandes dessinées appartient évidemment au domaine de la presse.

L'usage du mot médium au sujet de la bande dessinée a surtout une vertu tactique. Il permet d'éviter l'erreur courante qui fait de la bande dessinée un genre - ce qu'elle n'est évidemment pas - erreur qui conduit à associer, par exemple, le « polar », la « science-fiction » et la « bande dessinée », en oubliant que les deux premiers sont des sous-catégories du roman (ou du film), alors que la bande dessinée est une forme d'expression particulière.

Il se dégage, du coup, un usage largo sensu du mot médium, définissable comme « moyen d'expression » (et non plus de communication) « usant de moyens, de formes ou de conventions spécifiques ». La bande dessinée, dans cette acception, est cousine germaine du dessin d'humour et fille de l'histoire en images (qui n'est pas morte ; voir plus haut).

 

Mise en page : Agencement de l'espace compartimenté de la page.

(Groensteen) : Opération fondamentale de la spatio-topie*, consistant à distribuer les vignettes de la bande dessinée dans le dispositif de la planche.

 

Monstration (Groensteen, d'après Gaudreault) : Production d'un simulacre analogique*. La bande dessinée nous montre les personnages en train d'agir (monstration) au lieu de nous dire ce qu'ils font (narration*). Monstration a d'autres sens, par exemple (Schaeffer) : ce qu'une image donne à voir, par opposition à représentation*, ce à quoi elle renvoie, ce à propos de quoi elle est.

Voir figuration*, narration*, représentation*.

 

Motivation : En sémiologie, la motivation s'oppose à l'arbitraire* du langage.

 

Multicadre (Van Lier) : L'espace compartimenté d'une planche de BD. Une page de BD qu'on a vidée de son contenu et dont il ne reste que les contours (on garde aussi par convention les contours des bulles). Ne pas confondre avec l'hypercadre*.

 

Narration : Dans un sens restreint, il y a narration quand un narrateur nous dit ce que font les personnages. S'oppose dans ce sens à monstration*.

 

Narratologie (Todorov) : La science du récit.

 

Naturalisme : En sémiologie de l'image, la croyance que les modalités de la représentation sont basées sur l'imitation de la nature. S'oppose au conventionnalisme*.

 

Nostalgique : Personne qui s'intéresse à un auteur, une série, un album, un fascicule, etc., parce qu'il l'a lu, ou qu'il l'aurait voulu lire, étant petit. Il y a donc des générations de nostalgiques, mais celle qui a eu le plus d'influence sur la littérature consacrée à la bande dessinée* est de loin la seconde, grandie avec les illustrés dits de l'âge d'or*, publiant des comic strip*s américains.

 

Obtus (sens) (Barthes) : Un troisième sens, après le sens de l'anecdote (relevant de la communication) et le sens obvie* (relevant du symbolique). Le sens obtus est flou, inanalysable, découle des « accidents signifiants » (par exemple, au cinéma, d'un visible déguisement des acteurs) et impose un nouveau découpage.

 

Obvie (sens) (Barthes) : Un deuxième sens (après celui de l'anecdote, relevant de la communication) relevant du symbolique.

 

Offset : procédé d'impression à plat où l'encre est portée sur un blanchet avant d'être déposée sur la page. Permet une grande finesse de trait.

 

Panel : Equivalent américain de case ou vignette. Aussi : daily panel. Série réduite à une seule vignette en semaine, tout en conservant parfois une sunday page (Committed). Mais beaucoup de panels restent des panels le dimanche, quoique d'un format différent (Reality Check).

Proche du dessin humoristique, mais présentant soit des personnages récurrents (Dennis the Menace, Marmaduke, Pavlov, Ziggy, etc.), soit un univers mental cohérent (The Far Side, Beattie Blvd, Close to Home, etc.), le daily panel est le cas limite d'un daily strip réduit à une case.

 

Paperback : Un livre avec une reliure flexible en carton. Désigne particulièrement des livres au format de poche, qui ont souvent publié les mêmes genres que les pulps*, dont ils ont pris la suite.

 

Pastiche : Synonyme, dans le jargon de la bande dessinée, de parodie (Les Pastiches de R. Brunel aux éditions Glénat).

 

Penny dreadful : Roman d'aventures sensationnelles ou relatant les exploits de criminels, apparu en Angleterre dans le dernier quart du 19e siècle et populaire jusqu'au début du 20e.

 

Péri-champ (Peeters) : vignettes autour de celle qu'on regarde.

 

Péritexte (Genette) : tout ce qui entoure matériellement le texte. Appliqué à la BD, il amène à étudier le livre, le fascicule ou l'album sous sa forme matérielle, en tant qu'objet commercial. L'approche linguistique tend à privilégier les textes qui « entourent » la BD : titre, dédicace, colophon, prière d'insérer, etc.

 

Périodique : Tout ouvrage qui paraît à des temps marqués. Dans un sens plus restreint, désigne, de façon illogique mais constante, les journaux publiant des bandes dessinées qui ne sont ni des récits complets ni des petits formats.

 

Petit format : Successeur du récit complet*. Ainsi dénommé à cause de ses dimensions (approximativement 13 X 18 cm). Apparaît en 1949 et se développe rapidement dans les années 50. En rapide déclin dans les années 80, il est moribond au début du 21e siècle. D'aventure ou humoristique, il contient du matériel français, italien, anglais, espagnol, néerlandais, nord- ou sud-américain. Les petits formats pour adultes contiennent du matériel érotique ou des fumetti neri.

L'appellation petits formats est erronée, car ces publications sont souvent assorties de suppléments de grand format, certaines n'existant qu'en grand format (appelé parfois « géants », alors qu'un célèbre petit format fut baptisé « digeste comique »). Il s'ensuit une extrême confusion, certaines publications de grandes dimensions des éditeurs spécialisés étant répertoriées, selon les sources, dans les petits formats, les récits complets (ou les « nouveaux récits complets » !) et - pourquoi pas - les périodiques, ou bien étant délibérément passées sous silence par des nomenclaturistes prisonniers de leurs définitions.

 

Photo-roman : Récit présenté par une succession de photos, montées sur la page comme les cases d'une bande dessinée, et assorties de textes présentés dans des structures rappelant lointainement des ballons.

 

Phylactère : Voir ballon*.

 

Planche : La page de bande dessinée dans l'argot du métier. Terme adopté par les lecteurs, par goût de la parlure.

 

Psychologie extérieure (nous-même) : désigne tous les procédés permettant de faire connaître l'intériorité d'un personnage autrement que par ses paroles ou ses pensées, par exemple (exemples tirés d'Eisner) l'usage de stéréotypes physiques, de conventions posturales, d'objets symboliques, vêtements, accessoires, etc.

 

Pulp magazine (ou pulp) : Magazine populaire aux Etats-Unis, imprimé sur très mauvais papier en pure pâte de bois (pulp signifie pâte à papier), spécialisé dans les genres les plus divers, mais toujours sensationnels (sport, aviation, détective, science-fiction, fantastique, horreur, histoires salaces, etc.) S'oppose aux slicks, magazines imprimés sur papier lisse, de bonne tenue, et qui mélangent fiction et articles. Les pulps ont inspiré les comic books quant à la thématique et quant à la qualité du papier. Ils leur ont donné maint héros : Conan, The Shadow, Doc Savage, etc.

 

Récit complet : Ancêtre à la fois de l'album de BD et du petit format*. Apparu au début des années 30 et disparu dans les années 50, sa phase de maturité étant l'immédiate après-guerre. En théorie, contient une histoire complète (d'où le nom). En pratique, contient souvent un épisode d'une histoire à suivre, d'autant que le nombre de pages est réduit (en général de 8 à 20, y compris la couverture). Format à la française ou à l'italienne. Le récit complet est difficile à distinguer du petit format qui prend souvent sa suite.

 

Relais (Barthes) : prise en charge du sens par le texte, l'image seule étant incapable de transmettre ce sens. L'autre fonction du texte est l'ancrage*.

(Nous-même) : Passage du texte au dessin ou du dessin au texte dans la transmission du sens. S'oppose à complémentarité*.

 

Représentation : Le fait qu'une image renvoie à un référent (fonction référentielle de l'image). Selon nous, la représentation empêche de découper l'image en unités* élémentaires et empêche par conséquent la double articulation*, de sorte qu'il n'y a pas, dans l'image, de langage* au sens des linguistes.

 

Revue d'études : Propose des études sur la bande dessinée*. Il s'agit normalement d'un fanzine*, mais on connaît des cas de revues devenues professionnelles.

 

Roman en livraisons : Tout roman paraissant en pièces détachées, à des temps marqués, par exemple sous forme de fascicules mensuels.

 

Roman sensationnel : Forme de roman apparue en 1860, avec The Woman in White de Wilkie Collins, et représenté par des auteurs comme Charles Reade, Mrs. Braddon, Mrs. Henry Wood, accusé par ses détracteurs d'avoir une action néfaste sur les nerfs du lecteur.

 

Scénariste : Personne qui écrit une bande dessinée. En général, le scénariste propose à son dessinateur un découpage en planches et en vignettes, avec indication de lieu, de temps, de cadrages, et description de la vignette. Le scénariste écrit aussi les dialogues et il arrive qu'il fournisse des éléments de documentation.

 

Sémiotique (ou sémiologie) : Etude des systèmes de signes (voir code*). Le plus important des systèmes de signes (et le modèle de tous les autres) est la langue, mais il existe de nombreux systèmes de signes, plus ou moins élaborés (la numérotation des chambres d'hôtel, les insignes des militaires, les signaux de marine, le code de la route, etc.), et les sémiologues ont fait l'hypothèse que des formes sociales fonctionnaient elles aussi comme un langage (les mythes, étudiés par Lévi-Strauss, la mode, étudiée par Barthes, les gestes, étudiés par la kinésique de Palo-Alto, etc.). On a tenté, depuis les années 1960, de décrire les littératures dessinées comme des systèmes de signes (avec éventuellement des sous-systèmes, codes des gestes, des couleurs, de la bulle, etc.), mais aucune description donnée n'est satisfaisante et l'existence de tels systèmes de signes est contestée.

Sémiotique désigne aussi l'un des systèmes de signes (en toute rigueur, un système présentant la double articulation*).

Voir structuralisme*.

 

Séquentiel : Deux ou plusieurs images sont séquentielles si elles conduisent un récit*. Deux cases de bande dessinée sont séquentielles. Deux tableaux sur un mur, deux panneaux publicitaires sur la même route, les symboles des quatre évangélistes sur la première page d'un évangéliaire médiéval ne sont pas séquentiels.

 

Signifiant : Pour Saussure, la moitié du signe représentant l'élément sensible pour l'usager. Par exemple, le mot /chat/.

 

Signifié : Pour Saussure, la moitié du signe représentant le concept, par exemple l'idée d'un « chat ». Il ne faut pas confondre le signifié avec l'objet lui-même, appelé référent (par exemple le chat qui dort sur mon fauteuil, ou l'ensemble des chats existants). La sémiologie saussurienne s'occupe des rapports entre un signifiant et un signifié et non entre un signe et un référent.

 

Shôjo manga : Bandes dessinées japonaises plus particulièrement destinées aux filles, présentant souvent des particularités dans la forme (composition très libre des planches) et dans le style.

 

Solidarité iconique (Groensteen) : « La mise en relation de plusieurs espaces iconiques, tout à la fois séparés et solidaires ». « On définira comme solidaires les images qui, participant d'une suite, présentent la double caractéristique d'être séparées (cette précision pour écarter les images uniques enfermant en leur sein une profusion de motifs ou d'anecdotes) et d'être plastiquement et sémantiquement surdéterminées par le fait même de leur coexistence in praesentia. » Voir découpage*, mise en page*, arthrologie*, dispositif spatio-topique*.

 

Space opera : Une branche de la littérature d'anticipation consacrée aux voyages spatiaux. Des histoires d'astronautes et d'extraterrestres.

 

Spatio-topie (Groensteen) : voir dispositif spatio-topique*.

 

Strip : Une bande d'une bande dessinée*. Alignement horizontal de vignettes, ou une seule vignette allongée. Voir comic strip*.

 

Structuralisme : Courant de doctrine ayant traversé les sciences humaines, trouvant son origine dans l'anthropologie de Lévi-Strauss, mais ayant essaimé à la psychanalyse avec Lacan, à la philosophie avec Derrida, et particulièrement développé dans le domaine de l'analyse littéraire avec Barthes, Greimas, Genette, Todorov, Kristeva, etc. Le structuralisme applique les méthodes de la linguistique aux sciences humaines et insiste sur le système au lieu du contenu, en utilisant, en théorie, comme méthode les oppositions binaires.

 

Symbole (nous-même) : Dans le dessin, un sens précis associé par exemple à la position des personnages, leur taille respective, leur gestuelle, l'utilisation de tels ou tels accessoires, etc. Le symbole utilise la représentation et partage ses caractéristiques : il est impossible à découper en unités élémentaires et il ne possède donc pas, par définition, la double articulation*, caractéristique d'une langue.

Symbole a d'autres sens, nombreux et contradictoires, en linguistique et en sémiologie.

 

Syndicate : Equivalent américain d'une agence de presse. Distribue, entre autres, des bandes dessinées*. En France, certains éditeurs de bande dessinée* assurent accessoirement le rôle de syndicate.

 

Temps de la lecture (nous-même) : Temps défini par l'usager qui règle sa vitesse de consommation d'un produit culturel. Correspond à la lecture* d'un livre, à la promenade dans un édifice, à la visite d'une exposition, etc., par opposition au temps des médias audiovisuels dont le défilement est imposé au spectateur.

 

Temps réel (nous-même) : Celui des événements de la vie réelle.

 

Temps de l'action : La temporalité propre de l'action, le temps des événements fictifs d'un monde imaginaire. Synonymes : mimèse, temps mimétique.

 

Underground : Mot d'origine américaine  ; littéralement : souterrain. Exprime une idée de clandestinité (le mot désigne la Résistance). Dans notre domaine, recouvre particulièrement les bandes dessinée issues de la contre-culture, mouvement anarchisant et hédoniste apparu sur la côte ouest des Etats-Unis dans les années 60. La notion implique aussi des circuits de distribution particuliers, et parfois confidentiels, et une position esthétique en rupture avec les courants traditionnels.

 

Unités : Le signe linguistique se décompose en unités élémentaires. On distingue des unités de sens, ou sèmes (première articulation* de la langue) et des unités seulement distinctives, ou phonèmes (seconde articulation* de la langue). Par exemple, le mot /chanteur/ se décompose en deux unités de sens (première articulation) : /chant/, qui fait référence à une activité de vocalisation et /eur/, qui indique un agent. On peut décomposer /chant/ et /eur/ respectivement en deux sons, qui en eux-mêmes ne signifient rien et sont seulement des unités distinctives (deuxième articulation).

En sémiologie générale, un code quelconque possède la première, la deuxième articulation, ou les deux, ou aucune (voir articulation*).

En sémiologie de l'image, les unités distinctives (deuxième articulation) sont d'hypothétiques unités « matérielles », équivalentes des phonèmes dans la langue. On les oppose aux unités minimales de sens (première articulation) ou graphèmes. Faute de double articulation* dans l'image (voir à articulation*), faute de pouvoir isoler des unités élémentaires, les signes en sémiologie de l'image sont souvent définis de façon empirique (exemple : le /dessin du nez d'Achille Talon/ signifie « nez d'Achille Talon »).

En sémiologie de la bande dessinée, unités désigne aussi les éléments morphologiques du système de la bande dessinée (cases, strips, etc.).

 

Zine : Voir fanzine.